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Rencontres_de_la_Toile_Numerique
20 septembre 2005

Mettre un pied dans le marche... le pied gauche!

monnaie1Je remercie Jean Poumarede d'avoir publié sa réflexion:« l'Art et L'Art... Gent » car il me permet de la prolonger par quelques mots et d'échanger avec lui mes points de vue sur les galeries. Je m'empresse de faire abstraction des faux galeristes cités dans son article, dont la compétence en l'art se résume à l'obtention d'un numéro de registre du commerce et d'une boutique au coin d'une rue parce que c'est plus passant. Comme les bandits de grand chemin, il vous attendent au coin de la rue, ces voraces. Ils fonctionnent souvent comme de vulgaires marchands de tableaux. Ils existent, j'en ai rencontré mais sont fort heureusement peu nombreux. Au même titre que dans d'autres professions, remarquez. Jean Poumarede a raison lorsqu'il écrit que la vocation des galeries est d'être « découvreur de talents ». Cela étant, il faut proportionner cette vocation à l'importance de la galerie, son ancienneté et l'importance de la ville où elle officie. On vendra plus facilement toutes les expressions artistiques dans une ville de plusieurs millions d'habitants que dans celle à plusieurs milliers, c'est mathématique. En clair, il faut évaluer la capacité (financière) de la galerie à prendre des risques. Ce qui explique que certaines se couvrent à l'occasion d'une exposition d'un nouvel artiste, en faisant supporter à celui-ci une part importante des coûts proportionnés à la notoriété de ladite galerie. Elles se positionnent alors en prestataire de service, en loueur de salle.
 
Je reste plus circonspect, lorsque Jean Poumarede écrit: « Mais à l'exemple de la majorité des éditeurs littéraires, les propriétaires de galeries pourraient [...] faire leur métier qui est celui de découvreur de talents. ». La comparaison entre galerie et éditeur est fréquente chez les artistes-peintres lorsqu'ils veulent asseoir l'argument d'aide aux jeunes talents. Argument mélé, c'est selon, de regret, d'armertume ou d'aigreur. Argument, soyons honnête, que je me suis surpris à utiliser aussi. En creux, s'incrit l'idée qu'un artiste est (fatalement) pauvre et qu'un galeriste est (fatalement) riche et donc, tel Robin des Bois, ce dernier doit aider le premier car c'est sa « vocation ». L'art pictural s'incrit, qu'on le veuille ou non, dans une économie de marché et les artistes doivent s'y adapter. De tous temps, d'ailleurs, les peintres ont monnayé leur savoir-faire, leur art. Il existe des inégalités entre forme d'expression artistique. Entre les artistes-peintres , les écrivains ou les musiciens, par exemple. C'est bien la rémunération de l'oeuvre et donc de l'artiste qui est le coeur de cette inégalité. C'est pourquoi, certains artistes-peintres demandent à être rémunéré pour leur présence à une exposition collective. La différence comptable majeure est qu'un éditeur pourra vendre une oeuvre des dizaines de millier de fois tandis qu'un galériste, une fois. Un éditeur pourra se permettre de miser sur un nouvel auteur grâce à une capacité d'investissement dû à un catalogue de classiques inlassablement réédité et l'assurance des ventes des grands noms de la littérature (qui sont achetés mais peut être pas lus). J'étais d'accord sur la notion de vocation à être « découvreur de talents », maintenant le métier d'une galerie est de faire du chiffre d'affaires comme tous commerces. Si elle recherche des talents nouveaux, ce n'est pas tant par amour de l'art que pour renouveller réguliérement son écurie. Par intérêt marketing, en somme. Pour une exposition personnelle publique, sauf entregent, il faudra, de tout manière, compter les frais de location, de communication et de vernissage. Avec le même résultat incertain quant à sa rentabilité.
 
Le vrai risque des galeristes se situe au niveau de l'organisation d'une exposition d'un nouveau venu. La pratique courante pour ses professionnels et, souvent, de prendre en dépôt un artiste pour jauger sa clientéle potentielle. Vous vous retrouvez dans un coin intimiste où vos oeuvres se retrouvent dans un porte-tableau, en vrac, prés d'un néon à l'agonie. Avec l'espoir que votre travail soit découvert au détour d'une fouille par un esthète de l'art. Le risque est équivalent à zéro pour le galeriste, puisque cela ne lui coûte rien, il ne demande rien à l'artiste hormis une commission sur la vente, si vente il y a. Le vrai galeriste, en bon professionnel, doit connaitre sa clientéle réguliére. Car, tout est là, vendre réguliérement et créez avec lui, un binome commercial. Si deux galeries vous refusent, revenez de préférence vers celle qui vous a dit pourquoi, car quoi qu'on en pense, le galeriste professionnel est de bon conseil. Si vous avez vendu, le galeriste vous sortira le grand jeu, une main sur l'épaule, et entre deux bouffées de Monte-Christo, vous dira :« Toi, mon coco, tu iras loin... mais pas chez la concurrence, j'espére... Ah,ah,ah ». On aime bien rigoler chez ces gens là. Exposition en dur, cimaises et spots multidirectionnels. « En haut de l'affiche, en trois fois plus gros, votre nom s'étalera. ». Génial, vous pourrez manger tous les soirs.
 
Bon, je plaisante, mais c'est à partir de là que le travail de l'artiste commence vraiment : continuer à séduire sa clientèle et donc, ses diffuseurs. L'art est une action de commerce, au sens littéral du terme. L'oeuvre est un matériau d'échange qui prend son sens dans une acquisition ou un don. C'est pourquoi je fustige l'art contemporain pour sa production artistique approximative mais reste fasciné par son mode de fonctionnement. Il a escamoté le client final en tant qu'individu au profit des institutions , a réussi le tour de force de financer l'artiste pour l'exposition ou la réalisation de son oeuvre et non pour sa vente et fait en sorte que l'oeuvre touche un large public. Pourquoi la peinture numérique ne pourrait-elle pas suivre ce chemin? Vis-à-vis des galeries, la question est de savoir si tout artiste accepte de devenir un produit. La dérive commerciale est souvent celle là, non pas de vendre ses oeuvres (il faut quand même en vivre) mais d'être amené à formater son travail pour vendre un « nom », un esprit de travail, une thèmatique qui sont, de fait, valorisés par leur exposition. Le travail artistique devient alors instrumentalisé par les marchands sans que cela altére, à mon sens, la qualité des oeuvres. Qui d'entre nous ne s'est pas trouvé, à un moment donné, dans la situation de produire pour atteindre le quota d'oeuvres exposées? On peut, c'est vrai, se demander alors, si l'oeuvre est toujours véritablement oeuvre d'art. Le plus grand mystificateur de l'Histoire de l'Art, je veux bien sûr parler d'Andy Warhol, l'avait bien compris et a joué de cette ambiguïté.
 
Même si comme l'écrit Jean Poumarede, l'artiste est « mû par un sentiment qui le dépasse », je ne crois pas, contrairement à lui, que l'artiste (tous les artistes) ne travaille pas pour l'argent. Cela entretient le fameux couplet de l'artiste pur situé au delà des contingences matérielles. « l'argent, c'est sale. Le commercial, c'est pas beau. ». Si, au moment de l'acte créatif, l'artiste est dans son oeuvre. Une fois, le travail terminé, il est dans la (sa) vie. Retour dans le monde merveilleux des factures. La valorisation marchande doit, bien sûr, participer au moteur de toute une production et non de la création d'une toile.
 
Jean Poumarede écrit que des galeries physiques ferment à cause « du développement d'un marché parallèle (notamment via internet) où le pire côtoie le meilleur. » D'une part, je ne crois pas qu'il existe un marché parrallèle de l'art sur internet, il s'agit juste d'un complément pour l'artiste car il lui permet de s'abstraire des coûts innérants à la diffusion de ses oeuvres. Ce n'est que la continuité d'un marché existant avec une nouvelle forme de diffusion voire de vente. D'autre part, seuls, les artistes côtés peuvent véritablement profiter de ce marché virtuel. Pour les autres, les jeunes artistes (jeunesse en notoriété et non pas obligatoirement en âge), internet ne sera qu'un support informatif. La cotation se fait de toute manière, juqu'à preuve du contraire, dans une exposition physique ou dans un vente publique.
 
Si de nombreuses galeries ferment, c'est simplement à cause d'un phénoméne de concentration qui existe, par ailleurs, dans l'industrie. Phénoméne qui ne laissent aucune chance aux galeries de petite envergure et qui a pour objectif, la recherche de rentabilité immédiate. Les fausses galeries, citées plus haut, disparaissent en l'absence d'une vraie capacité de concurrence. Qui s'en plaindra? Qu'on côtoie le pire et le meilleur sur internet n'est pas en soi une nouveauté. Le réseau n'est que la continuité des individus qui composent notre société. Il rend encore plus criardes par son prisme les différences existantes et entretient confusemment l'existence du fameux quart d'heure de gloire cher à Andy. Et non, je ne crois pas qu'internet remplacera les galeristes physiques. Surement que leur profession évoluera commercialement au gré des nouvelles technologies.
 
Sur internet, la véritable escroquerie se situe aux niveau des galeries virtuelles qui font payer pour exposer sur une page sans garantie aucune de toucher un public. Vous payez pour être réferencé dans un catalogue d'artistes, en quelque sorte. Ce qui n'est pas sans rappeler les marges arrières des hypermarchés. Pour conclure, il existe un vrai secteur alternatif de diffusion d'oeuvres qui, certes n'est pas nouveau mais a pris son essor en fonctionnant en réseau et en se professionnalisant. Je veux parler des galeries collectives ou publiques dont le fonctionnement subventionné, qui n'est pas assujetti à la rentabilisation des artistes exposés, permet de découvrir (soutenir l'essor) de nouveaux talents. Chose que ne peuvent, relativement, plus envisager les galeries institutionnalisées, coincées dans leur fonctionnement industriel. Dans leur cas, il s'agit souvent de spéculation. L'Art est de la matière vivante, donc il sera toujours préférable, malgré internet, de rencontrer les vrais gens. L'Art est de la matière passionnelle, donc il sera toujours préférable, de réagir en professionnel et de jauger vos interlocuteurs. Et à ceux qui vous disent réguliérement: « J'aime beaucoup ce que vous faites. », répondez leur:« Vous m'aimez combien ? ».
 
Je demeure entièrement d'accord avec le questionnement qui sous-tend le texte de Jean Poumarede: Les galeries, dans leur fonctionnement actuelle, défendent elles l'intérêt des artistes numériques en même temps que les leurs? Les galeries restent elles un outil incontournable pour la diffusion de tous les arts plastiques, y compris la peinture numérique? Je pense que non et que ce réseau professionnel doit adapter ses méthodes de commercialisation aux nouvelles formes d'expression au risque de voir émerger un réseau physique alternatif dans lequel se développera véritablement le marché de la peinture numérique. La peinture numérique est une expression artistique qui a le cul entre deux chaises, elle n'est plus vraiment un art traditionnel et pas vraiment un art contemporain. Elle est, par nature, souvent dévalorisée au profit de la peinture à l'huile ou acrylique (enfin tous travaux uniques rééllement réalisés à la main), par exemple. Préjugé idiot mais qui tire son existence d'une soi-disant incompatibilité entre informatique et création et donc d'un manque de crédibilité artistique et de valorisation marchande. Pour ce qui la concerne, Il est surement temps d'envisager un nouveau moyen de diffusion et de promotion indissociable de son outil de production qu'est l'ordinateur et de ses périphériques d'impression. Il se pourrait que celui-ci se développe à l'initiative des artistes eux-même. J'avais, dans une vie antérieure, émis une idée (qui est restée à cet état, d'ailleurs) d'un nouveau lieu appelé Centre d'Art Numérique. Nouveau lieu qui associerait un espace de production et notamment d'impression pour les artistes, d'initiation à la peinture numérique pour le grand public. Ainsi que pour les artistes toujours, un espace d'exposition et de cotation (vente publique) et un espace de documentation sur l'art numérique pour tous. Peut-être verra t'il le jour, avec le soutien des artistes et des amateurs de peinture numérique?

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